Texte : Aurélie AVÉ
Sombre comme peut l’être un jour de pluie, noir comme peuvent l’être les ténèbres, mon regard se fixe vers l’immensité marine aperçue quelques instants plus tôt.
La nuit s’est installée ne laissant pour seule lumière que le reflet de la lune en contrebas sur les vagues timides de la lagune peinant à atteindre la plage de sable fin.
Avançant lentement, pas à pas, le vent marin repoussant sans effort aucun les mèches de cheveux collées sur mon visage, j’atteins le bord de la falaise d’une hauteur impressionnante.
Seul le ressac se fait entendre, toute vie est endormie excepté la mienne, qui contemple ce paysage infini, et celle de Palwynn, traînant sa chaîne à mes côtés.
Cette grandeur projetée devant moi, je ne peux qu’éprouver respect et petitesse de soi – démontrant que l’être humain n’est qu’une entité dont l’existence est si infime, si éphémère, si fragile…
En tant qu’humain, se remettre en question devant un tel panorama est chose presque trop aisée pour être conscient de sa futile existence pourtant opposée à une si grande volonté de vouloir la rendre si merveilleuse et importante aux yeux du plus grand nombre.
Une mûre réflexion démontre l’insignifiance de ce rêve et le dérisoire de cette trace que le mortel tient absolument à laisser.
Que devrais-je alors penser à la vue de cette immortalité damnée? Suis-je encore humaine ?
Ce précipice s’ouvrant devant moi, formé par les coulées de lave d’un volcan autrefois grondant, apporte une cruelle beauté, renforçant ce sentiment d’impuissance par lequel je fut envahie jadis.
L’admiration portée à cet endroit conforte cette sensation me ramenant à mon état de simples particules assemblées afin de former une entité parmi tant d’autres dans cet univers infini, univers dont mon âme sœur et moi-même sommes scellés.
Pourquoi essayer inutilement de trouver sa place au sein de groupes prédéfinis… ?
Pourquoi essayer vainement d’accomplir une pseudo quête d’idéal par l’enrichissement matériel en dépit de l’idéal d’autres entités… ?
Toutes ces questions sont désormais vaines ; l’idéal n’existe plus, le désir n’existe plus. Seuls les combats, la fuite et la succession interminable de lendemains tristes et sans fin deviennent notre quotidien, encore et encore.
Un trouble emplit mon esprit d’incertitudes se heurtant les unes aux autres créant un chaos ; ce tournoiement de pensées alors si soudain, chamboule également le fond de mon subconscient.
Toutes les vérités établies s’effondrent, toutes les questions existentielles ressurgissent me confortant dans mon incapacité à comprendre ce monde, dans mon incapacité à en faire partie…
Le silence quotidien de Palwynn me renvoie à ma solitude, une solitude qui m’enveloppe presque charnellement pour me rappeler sa présence inévitable et insoutenable.
Je ploie sous ce vertige, sous cette prise de conscience de mon état en tant qu’être noyé dans une masse où ce moi est seul, incompris et rejeté.
Maintenant à genoux, la tête se tournant de chaque côté essayant de trouver une solution, une lumière dans les ténèbres, un signe qui me donnerait une indication sur la marche à suivre…
Le monde a changé, le temps a passé, la nature a évolué et les titans blancs font partie intégrante de ce paysage.
Seront-ils les nouveaux protagonistes de l’évolution de ce monde?
Cette litanie de nouveaux combats, siècles après siècles, s’arrêtera-t-elle un jour ?